L’étrange panne du F-GEAL
Un objet tournant sur lui même tend à conserver la direction de son axe de rotation. Tenter de modifier ce paramètre exige d’exercer un effort sur l’axe de l’hélice. Ce principe physique explique l’étrange panne du Pitts S2-B immatriculé F-GEAL survenu le 8 décembre 2013 à Meaux et conduisant à la perte de son bloc hélice puis à un atterrissage d’urgence.
Le 8 décembre 2013, le pilote, accompagné d’un passager, décolle de l’AD Meaux
(extrait rapport d’enquête BEA)
Esbly pour un vol de voltige. Il est aux commandes d’un Pitts S2-B à moteur Lycoming AEIO-540 et hélice bipale métallique Hartzell. Lors de ce vol, il réalise plusieurs figures qui entraînent une variation rapide de l’orientation de l’axe de rotation de l’hélice. De retour, en vent arrière, le pilote ressent des vibrations. Leur intensité augmente, il réduit la puissance du moteur et se déclare en situation d’urgence.
L’ensemble formé par l’hélice et une partie du vilebrequin se désolidarise du moteur et heurte la dérive. Le pilote constate l’apparition de fumées et la présence d’huile sur le pare-brise de l’avion. Il arrête le moteur et réalise un atterrissage forcé. Passager et pilote sont indemnes.
Ressentir l’effet gyroscopique
Derrière ce mot d’apparence mystérieuse se cache une notion de physique que nous côtoyons en fait assez souvent.
Vous êtes-vous déjà demandé comment une toupie, un hand-spinner ou un diabolo, tenaient l’équilibre ? Vous avez sans doute constaté un point commun entre ces trois objets : ils tournent sur eux-même. C’est à cette condition que pourra se manifester cet effet gyroscopique.
L’équilibre d’un vélo, d’une moto reposent également sur ce principe dont une version très simplifiée pourrait être : un objet qui tourne sur lui-même tend à conserver une même orientation et s’oppose de ce fait aux changement de direction de son axe de rotation.
Retour sur l’accident de l’avion de voltige
Un avion, lors de ses évolutions, conduit l’axe de rotation de l’ensemble hélice,-arbre-vilebrequin à changer de direction. Un couple gyroscopique s’opposant à ce changement apparaît alors. Il est d’autant plus important que
- la masse de l’hélice est élevée et que le centre de gravité des pales est éloigné de l’axe de rotation,
- l’hélice tourne vite
- la manœuvre est brusque
Ainsi, si le phénomène peut être négligé sur un avion de tourisme ce n’est pas le cas d’un avion de voltige ou cela conduit à une fatigue prématurée des pièces en rotation. On en déduit également que l’hélice participe rendre l’avion plus stable (une grosse hélice qui tourne vite) ou au contraire plus maniable (Une hélice qui tourne lentement). Pour des évolutions serrées et très dynamiques,
La réalisation de figures de voltige telle que la vrille plate dos, le tonneau déclenché, le torque roll, etc. entraîne une variation rapide de l’orientation de l’axe de rotation de l’hélice, c’est-à-dire du vilebrequin, dans l’espace. Cela induit un couple, par effet gyroscopique, de l’hélice sur le vilebrequin, qui soumet ce dernier à des efforts de flexion rotative. C’est sous cette alternance de sollicitation en traction-compression qu’une fissuration progressive en fatigue s’est développée, au ras de la portée du joint spi du vilebrequin.
Extrait du Rapport BEA
Autres applications de l’effet gyroscopique
Heureusement, l’effet gyroscopique ne représente pas qu’un danger en aéronautique. Il présente même un certain nombre d’applications essentiellement dans le domaine de la navigation.
Instruments gyroscopiques pour la navigation
Qu’un dispositif tende à conserver sa position présente un intérêt pour la navigation aérienne car il permet d’envisager de maintenir un objet immobile dans une environnement en mouvement. Les deux principaux sont :
- L’horizon artificiel permet d’avoir toujours une image de la direction horizontale même lorsque les conditions de visibilité de permettent pas de voir son environnement (nuit, nuage).
- Le conservateur de cap qui, au contraire du compas magnétique, continue d’indiquer la même direction lorsque l’avion tourne autour de ses axes de rotation.
- La centrale inertielle d’une fusée est
Premier pilote automatique
En 1913, Elmer Sperry met au point un système de commandes automatiques des gouvernes qui permet à l’avion de conserver tout seul une route malgré les variations de vent ou les turbulence. Les actions automatiques des gouvernes sont commandées par un gyrocompas.
Rotation de la Terre
Même si le rapport à l’aéronautique n’est pas direct, il convient de préciser ici que notre planète se comporte comme une énorme toupie et que, si son axe de rotation pointe précisément vers les mêmes planètes l’effet gyroscopique y participe grandement.