Une alternative aux énergies carbonées ?
La volonté des acteurs de l’aérien de réduire les émissions polluantes produisant directement des gaz à effet de serre a conduit à réfléchir à l’utilisation de l’énergie électrique en substitution des sources d’énergie carbonées.
Dans une bataille des chiffres où chacun tire la couverture de son coté, la production de CO2 par passager-kilomètre la DGAC (aviation civile) avance une valeur de 102 g/pass.km alors l’institution ferroviaire considère une valeur de 128 g/pass.km (étude Bigo-SNCF)
Exemples et projets de développement
Actuellement des aéronefs électriques ne sont capables que de transporter de faibles charges eu égard à leur rapport poids/puissance et à leur autonomie. Déplacer par les airs des personnes ou du fret d’un endroit à l’autre de la planète en recourant à des moteurs purement électriques est inenvisageable.
Le projet Solar impulse a fait la démonstration qu’un homme pouvait voler seul dans un avion de très grand allongement dont les ailes tapissées de capteurs solaires lui fournissent 100% de son énergie de propulsion. La source primaire d’énergie est donc le soleil. Il réalise un tour du monde avec escale qu’il achève en 2016.
La solution consistant à motoriser un avion par l’électricité en embarquant des batteries a fait l’objet de recherches et de développement. On peut citer le projet E-fan de la société airbus qui ne s’est pas concrétisé par une commercialisation ainsi que le alpha-électro de la société Pipstrel qui est un ULM destiné à l’écolage.
Dans les deux cas ce sont des avions légers pouvant accueillir deux personnes et dont l’autonomie en vol est inférieure au temps de recharge.
La source primaire d’énergie est mixte (nucléaire, renouvelable et carbone en France) puis elle prend une forme chimique dans les batteries et enfin électrique pour ce qui est de l’alimentation du moteur.
Le déplacement des avions au sol (taxiage) fait aussi l’objet de recherches car celui-ci utilise assez largement les moteurs de l’avion. Or ces moteurs, ont un rendement plutôt optimisé pour le vol en croisière et même si la part de carburant consommé pour le taxiage est faible, il est donc apparu que le recours à l’électricité pouvait conduire à des économies.
La société Safran à développé dans ce sens un moteur électrique destiné à rendre propulsifs les trains d’atterrissage des avions. Ce projet n’a pas trouvé de débouché, car il est encombrant, lourd (400 kg) et qu’il utilise l’électricité produite par l’APU consommant lui-même du Kérozène. Bref : il faudrait trouver un système non-embarqué pour faire du taxiage électrique.
Piloter un aéronef depuis le sol est une activité que se développe. Elle présente l’avantage d’alléger l’appareil d’une petite centaine de Kilogramme. Ainsi, pour des travaux n’impliquant pas le transport de personne, de frêt ou de charge lourde, l’emploi de drone électrique ou thermique offre généralement des perspectives d’économies énergétiques. C’est le cas par exemple des travaux d’observation ou de captation d’image aériens.
Tout comme dans le domaine de l’automobile, la propulsion hybride est envisagée dans l’aéronautique. Le problème à résoudre est que deux types de moteurs doivent être embarqués au lieu d’un seul ce qui représente une masse supplémentaire et donc une surconsommation qui au jour d’aujourd’hui n’est compensée. Le ratio bénéfice/coût pose question.
Plusieurs projets devront faire leurs preuves dans les années à venir comme celui de la société Daher qui annonce un hybride turbopropulseur-électrique pour 2022.
Comme pour le 100% électrique, le progrès écologique que représente ce type de propulsion dépend du mix carbone du pays où se fait la recharge.
Comment fonctionne un moteur électrique ?
La technique
Un conducteur parcouru par un courant électrique, subit une force magnétique lorsqu’il est placé dans un champ magnétique. On retrouve donc dans un moteur électrique :
- un stator qui est la partie non tournante. Généralement la fonction du stator est de créer un champ magnétique.
- un rotor qui est la partie tournante généralement constitué d’une bibine de fil parcouru par un courant électrique.
La chaîne énergétique
D’un point de vue énergétique, un moteur convertit une énergie reçue en énergie mécanique (pour simplifier, il accélère les objets ou leur fait prendre de la hauteur). L’énergie reçue et qui permet de faire tourner le moteur peut avoir pour origine la combustion d’un carburant (cas des moteurs thermiques) ou bien elle peut provenir d’un générateur d’électricité.
Le moteur électrique bénéficie un très bon rendement de l’ordre de 90%, ce qui signifie que 10% de l’énergie électrique reçue est perdue au niveau des parties mobiles qui s’échauffent. Quand on dit très bon, c’est en comparaison du moteur thermique pour lequel on peut retenir que, au moins la moitié de l’énergie reçue est perdue. De ce point de vue, le moteur électrique est donc imbattable.
Jusque là tout va bien ! Ceci étant, un moteur électrique est toujours associé à un autre convertisseur d’énergie, celle qui permet de produire de l’électricité. Ainsi, aussi bien pour l’alpha-électro de la société Pipistrel que pour le projet d’avion hybride Daher on doit prendre en compte la présence nécessaire des batteries qui jouent le double rôle de réservoir d’énergie (sous forme chimique) et de dispositif de conversion de cette énergie chimique en énergie électrique.
Or à chaque charge ainsi qu’à chaque décharge un accumulateur au litihum génère une perte de 10 % sous forme de chaleur (vous avez certainement remarqué que lorsque vous chargez puis que vous utilisez votre téléphone portable, celui-ci émet de la chaleur).
Nous tenons donc un élément de comparaison simple d’impact écologique entre les deux chaines de propulsion embarquées à savoir le moteur électrique (rendement de 0,9*0,9*0,9 = 70%) et thermique (rendement de 50%).
Le rendement du moteur électrique seul n’a donc pas beaucoup de sens. C’est le rendement total de la chaîne de transformation qui doit être évaluée. Par exemple, alimenter sa tondeuse électrique avec un groupe électrogène c’est moins bon qu’utiliser une tondeuse thermique.
La densité énergétique
Si l’on veut comprendre pourquoi l’avion électrique n’est à ce jour pas une solution pour les gros avions qui doivent voler longtemps, le rendement n’est certainement pas le bon chiffre. En fait le vrai indicateur est ce que l’on appelle la densité énergétique. A savoir que, embarquer une réserve d’énergie dans l’avion, cela a un poids. Citons à titre de comparaison les deux formes d’énergie qui nous intéressent :
- 1kg de kérozène représente une réserve d’énergie un peu plus de 40 Méga-joule (MJ)
- 1kg de batterie lithium c’est un peu moins de 2 MJ
Soit un rapport de 1 pour 20 et encore on est gentil (parce qu’on aimerait que ça marche). Pour une batterie en fin de vie, ce serait plutôt 1 pour 40. Maintenant, le secteur des batteries doit être considéré comme un secteur en développement et on envisage peut être à moyen terme d’abaisser ce rapport à 1 pour 4 ou 5.
Un petit calcul
L’airbus A320 dispose de 2000 kg de kérozène dans ses réservoirs pour 20 0000 kg de charge utile (passagers, bagages, membres d’équipage …)
Or, 2000 kg de kérozène, cela représente 80 000 MJ d’énergie chimique et donc (si l’on prend en compte une rendement de 50 %) 40 000 MJ d’énergie mécanique (la poussée des réacteurs).
Maintenant calculons la masse des batteries qu’il faudrait embarquer pour disposer de la même réserve d’énergie mécanique.
le rendement du moteur électrique (70% est meilleur) donc il faut ne faut, bonne nouvelle, n’embarquer que 60 000 MJ pour notre vol. Mais il n’en reste pas moins en tenant compte de la densité énergétique que cela représente 30 000 kg de batterie ce qui est largement au delà des 2000 kg de kérozène et qui donc pénalise réellement la solution électrique. Même en vidant l’appareil de tout ce qu’il contient (drone) , il ne pourrait même pas décoller.
Un impact environnemental indirect
L’électricité : une forme d’énergie intermédiaire
L’énergie électrique est une source d’énergie intermédiaire et non stockable. Ainsi, on l’a dit, les batteries d’accumulateurs installées dans un avion, constituent une réserve d’énergie chimique et non électrique comme on pourrait le penser.
Aussi, il convient de garder à l’esprit que si la solution électrique peut apparaître, dans l’hypothèse où l’on inventerait des batteries à forte énergie spécifique, comme un substitut au énergies fossiles, en fait ça ne sera vrai que si l’on fabrique de l’électricité à partir de procédés verts comme l’éolien ou le solaire.
L’électricité est-elle une énergie verte ?
Comme on l’a dit précédemment, l’électricité est utilisée parce qu’elle représente un intérêt technologique mais elle n’est qu’une forme intermédiaire d’énergie. Comme elle ne peut être stockée, il n’existe nulle part une réserve d’énergie électrique exploitable comme il existe des réserves chimiques (le pétrole, le charbon) rayonnante (la lumière du soleil), thermique (un objet chaud) ou mécanique (de l’eau dans un barrage, le vent).
Par conséquent, il est absurde de la qualifier d’énergie verte ou d’énergie pas-verte tout simplement parce qu’elle peut avoir pour origine des processus de production renouvelables (éoliennes, barrages, solaire, biomasse) ou non-renouvelables (centrales nucléaires, centrales à charbon ou pétrole).
En développant des technologies électriques, l’aérien fait le pari que la production d’électricité va « verdir » petit à petit.
Prenons un cas absurde : Si demain on brûlait du kérozène pour produire de l’électricité dans le but de recharger des batteries dans un avion afin de le faire voler, le rendement de la chaîne énergétique serait tel que l’émission de polluants serait bien plus élevée.